Pour la première fois, Martin de la Soudière, ethnologue du « dehors »
et du temps qu’il fait, se livre à l’introspection. Cet essai
autobiographique sur le paysage est un retour aux origines, une entrée
sur le terrain pour l’ethnologue féru de géographie…
Véritable « entrée en paysage » qui a pour cadre la montagne, celle des Pyrénées en particulier.
Sur le mode du récit, Martin de la Soudière dialogue avec ses pères
et ses carnets de travail. Son corpus hors du commun rassemble des
écrivains, géographes, paysagistes, peintres, botanistes, mais aussi
grimpeurs, militaires, cartographes, taupiers, bergers et autres
promeneurs. Tous écrivent leur paysage. Franz Schrader, Élisée Reclus ou
Vidal de La Blache habitent l’imaginaire de l’auteur, au même titre que
les manuels d’escalades du XIXe siècle ou les livres de géographie du
jeune élève des années 1950/1960. Entrer en Pyrénées s’opère aussi à
différentes échelles, la vue statique et graphique avec son cadre et sa
lumière est indissociable de l’expérience de l’escalade, de la promenade
en famille ou de l’expédition aventurière entre frères et sœurs. Comme
Martin de la Soudière le dit, on entre en paysage avec le pied et avec
la main (on empoigne la matière de la roche pour grimper aux sommets).
Mais l’écriture du paysage, en plein vent et en cabinet, est aussi une
affaire de rituels. L’auteur scrute les gestes de ses poètes de
prédilection : Jean-Loup Trassard arpentant son bocage, Julien Gracq au
volant de sa deux-chevaux sur les rives de la Loire, André Dhôtel se
perdant dans la forêt des Ardennes, jusqu’à Fernando Pessoa le promeneur
immobile de Lisbonne. À travers ses « devanciers » comme il les
appelle, l’auteur revendique une intimité du paysage féconde pour la
réflexion et pour l’imaginaire.
Dans cet ouvrage, Martin de la Soudière « franchit » la montagne en
quelque sorte : inaugurant son récit par le souvenir de l’arrivée au
seuil des Pyrénées quand il était enfant, le père de famille proclamant
au volant de sa 15 chevaux « Et voici nos montagnes », il le termine de
l’autre côté du sommet, en Aragon, sur un dialogue avec son frère décédé
Vincent, dialogue aux accents d’énigmes sur une vue panoramique.
Le récit est accompagné de photos de famille, d’extraits des carnets de
Martin, carnets de son enfance jusqu’à aujourd’hui. Pour les amateurs de
montagne et randonneurs littéraires, lecteurs d’ethnologie sensible.