L'œuvre de Frederick Law Olmsted, le premier et le plus célèbre des
architectes-paysagistes américains, demeure paradoxalement mal connue.
Prolifique et protéiforme, elle est trop souvent éclipsée par sa
réalisation phare, qui en offre pourtant une vision réductrice :
l'immense parc urbain de Central Park à New York.
Le
présent ouvrage se propose de revisiter le parcours tortueux d'Olmsted,
d'en démêler les ressorts, aussi bien intellectuels et esthétiques que
politiques et économiques, et d'en dégager les cohérences, par delà son
évident éclectisme. En partie déterminée par l'impératif pécunier, sa
carrière connut de nombreux aléas : tour à tour fermier et horticulteur
passionné d'agriculture scientifique, journaliste et écrivain voyageur,
éditeur, maître d'œuvre et chef de chantier à la tête de plusieurs
milliers d'hommes, et même directeur de la plus grosse mine d'or de
Californie, il s'accommoda finalement du titre de landscape architect, qui ne lui plaisait guère et ne reflète qu'en partie son champ d'activité.
Les
recherches récentes dans les domaines de l'histoire urbaine et
environnementale, de l'histoire de l'art et de la théorie esthétique
permettent d'éclairer les réalisations paysagères d'un jour nouveau : au
delà de la reproduction d'une esthétique anglaise, pastorale ou
pittoresque, Olmsted, véritable urbaniste avant la lettre, chercha à
faire œuvre d'aménagement du territoire et ce, à toutes les échelles —
parcs urbains, réserves naturelles, voies de circulation et d'accès, banlieues
résidentielles et campus universitaires. Son cheminement intellectuel,
nourri d'expériences et de lectures multiples, permet de replacer ces
réalisations au centre d'une réflexion plus vaste sur démocratie et
barbarie, esclavagisme et capitalisme, villes et campagnes, récréation
touristique et préservation de la nature « sauvage ».