L'ouvrage:
L'Office Mondial du Tourisme fanfaronne : le milliard de touristes a
été atteint en 2012. Faut-il applaudir cet exploit et espérer que les
deux milliards de touristes se profilent avant 2020 ? Que signifie qu'un
Terrien sur quatre soit à un moment de l'année un touriste ? Une plus
grande tolérance envers autrui ? Une ouverture d'esprit marquée par une
curiosité sans limite et une disponibilité accrue envers ce qui nous est
étranger ? Le tourisme n'est pas neutre. Il génère une économie qui ne
profite qu'inégalement aux divers intermédiaires et il est faux
d'affirmer qu'un lieu en devenant touristique enrichit ses habitants. De
même faire croire que le hit-parade des « hauts lieux » de l'Humanité
mis en place par l'Unesco stimulerait une « mémoire collective » aux
fonctions éducatives se révèle un incroyable leurre. La multiplication
des équipements standardisés (aérogares, hôtels, musées, fronts de mer
et de fleuve, quartiers « historiques « , etc.) et des « grands » et
coûteux événements (festivals, coupes sportives, J-O, Expositions
universelles, etc.) homogénéisent les sites, leurs temporalités et leurs
spectacles. Le pic pétrolier et le dérèglement climatique appellent à
une plus grande responsabilité envers le pourquoi et le comment des
mobilités. Faut-il, là aussi, décroître ? Il convient, à coup sûr,
d'inventer un autre tourisme, plus proche du voyage et de ses
adaptations progressives aux cultures que l'on découvre, plus lent, plus
économe. L'être humain est relationnel, il serait aberrant de lui
interdire de voyager ! Mais, compte tenu des nouvelles contraintes, il
semble indispensable de repenser le proche et le lointain, ces deux
aimants de toute boussole existentielle.